Une décision opposant un reporter au média Les Inrockuptibles rappelle qu'en matière de droit d'auteur, l'originalité de la création revendiquée doit être strictement démontrée - la protection par le droit d'auteur n'ayant ici pas été reconnue (CA Paris, 30 mars 2022, RG 20/09164).
Les faits ?
L'éditeur des Inrocks a été assigné en contrefaçon de droits d'auteur par un reporter vidéo.
Ce dernier lui reprochait notamment d'avoir diffusé sans son autorisation sur le site www.lesinrocks.com, un reportage qu'il avait réalisé sur des manifestations.
Le reporter a été débouté de ses demandes.
Pour quelles raisons ?
On lui reproche de ne pas avoir suffisamment caractérisé l’originalité de ses créations qui ne peuvent donc pas bénéficier d’une protection par le droit d’auteur.
Le reporter soutenait qu'il avait souhaité « réaliser un reportage dynamique grâce à la sélection, par le montage des séquences, des moments les plus éloquents et des prises de vues les plus significatives exprimant la tension des évènements et les actions et réactions des participants ».
Les juges relèvent qu’il « s’agit de propos généraux et de règles de base d’un reportage journalistique ».
Selon eux, ces propos ne justifient pas des choix libres et créatifs adoptés par le reporter, de nature à traduire un parti pris esthétique.
A noter que l’originalité des reportages était contestée par le média – la Cour indique que cette originalité aurait dû être explicitée par le reporter.
Mes conseils et préconisations ?
Seules les œuvres dites originales sont protégées par un droit d’auteur : elles ne peuvent donc pas reposer sur la reprise d’éléments banals ou emprunts de l’art antérieur.
La décision rendue est selon moi, relativement sévère mais elle s’inscrit dans un courant jurisprudentiel qui impose de caractériser avec précision cette originalité (A titre d'exemple, Cass. Com. 6 sept. 2016, RG 14/15286).
En pratique, comment procéder ?
D'une part, définir la combinaison des caractéristiques que l’on souhaite revendiquer : faire une description objective de l’œuvre.
En cas de contrefaçon, cette combinaison de caractéristiques devra être reprise par le contrefacteur – la contrefaçon s’appréciant par les ressemblances et non par les différences.
D'autre part, détailler les choix libres et créatifs de l’auteur qui l'ont conduit à adopter cette combinaison originale de caractéristiques.
Ces choix libres et créatifs doivent précisément être décrits : les mentions générales telles que « les caractéristiques de l’œuvre portent l’empreinte de la personnalité de leur auteur » ou « elle traduisent un parti pris esthétique » sans autres explications ne sont pas suffisantes.
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