La brasserie parisienne revisitée & le principe de libre concurrence - le Bouillon Pigalle et le Bouillon Chartier peuvent coexister bien qu'adoptant les mêmes codes et concept

CA Paris, 14 sept. 2022 (n°20/13260)
 
𝗟𝗲𝘀 𝗳𝗮𝗶𝘁𝘀 ?
 
La société exploitant le "Bouillon Chartier" reprochait à l'exploitant des "Bouillon Pigalle" et "Bouillon République" des actes de contrefaçon et de concurrence déloyale/parasitaire.
 
Elle se prévalait d'une atteinte à la renommée de sa marque BOUILLON CHARTIER et reprochait à sa concurrente d'avoir adopté les mêmes codes et concept, tout en s'appropriant ses signes distinctifs.
 
𝗣𝗼𝘀𝗶𝘁𝗶𝗼𝗻 𝗱𝗲 𝗹𝗮 𝗖𝗼𝘂𝗿 𝘀𝘂𝗿 𝗹'𝗮𝘁𝘁𝗲𝗶𝗻𝘁𝗲 𝗮̀ 𝗹𝗮 𝗿𝗲𝗻𝗼𝗺𝗺𝗲́𝗲 𝗱𝗲 𝗹𝗮 𝗺𝗮𝗿𝗾𝘂𝗲
 
Pour justifier d'une telle atteinte, le titulaire doit justifier de la réalité de la renommée de sa marque (par son ancienneté, son succès, l'étendue géographique de son usage...).
 
Cette marque doit être connue d'une fraction significative du public concerné et dans une partie substantielle du territoire sur lequel elle est protégée.
 
La Cour admet que le BOULLON CHARTIER, qualifié "d'incontournable" par les guides, a une grande réputation relayée par les médias.
 
Mais elle estime que la marque est principalement connue des parisiens ou des touristes visitant Paris - sa notoriété est trop géolocalisée et la preuve de sa renommée n'est pas rapportée.
 
𝗣𝗼𝘀𝗶𝘁𝗶𝗼𝗻 𝗱𝗲 𝗹𝗮 𝗖𝗼𝘂𝗿 𝘀𝘂𝗿 𝗹𝗲𝘀 𝗽𝗿𝗮𝘁𝗶𝗾𝘂𝗲𝘀 𝗱𝗲́𝗹𝗼𝘆𝗮𝗹𝗲𝘀 𝗲𝘁 𝗽𝗮𝗿𝗮𝘀𝗶𝘁𝗮𝗶𝗿𝗲𝘀
 
La demanderesse revendiquait le principe du "bouillon" réinventé, symbolisé par son enseigne, son code couleur et son concept fondé sur des plats de qualité à bas prix.
 
En défense, il était soutenu que les codes propres aux brasseries parisiennes (le rouge, le style de service, la décoration "art-déco" etc.) ne peuvent faire l'objet d'une appropriation.
 
La Cour adopte cette dernière position et écarte tout comportement fautif :

  • le "Bouillon" est un type de restaurant populaire de la fin du 19ème tombé en désuétude qui n'a jamais cessé d'être exploité par le BOUILLON CHARTIER,
     
  • ce modèle économique du bistrot revisité connaît un regain avec l'ouverture de restaurants selon ces codes, cette cuisine traditionnelle et ce décor "art-déco".

Selon elle, le BOUILLON CHARTIER ne peut revendiquer être à l'origine du "bouillon" qu'elle n'a fait qu'améliorer, ni même se prévaloir de droits particuliers du fait de la remise au goût du jour et de l'engouement des consommateurs pour ces établissements.
 
Il ne peut reprocher à sa concurrente d'avoir adopté des codes propres aux brasseries parisiennes et de faire usage du terme "bouillon" qui ne peut être monopolisé du fait de son caractère générique pour désigner un type de restaurant.

Image : Unsplash


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