Le Tribunal judiciaire de Paris a condamné Eric Zemmour, candidat à l’élection présidentielle, pour contrefaçon de droits d’auteur à la suite de l'insertion d’extraits de films dans sa vidéo de campagne diffusée sur YouTube (TJ Paris, 4 mars 2022, RG n°22/00034).
En défense, Eric Zemmour se prévalait notamment de l'exception de courte citation et de sa liberté d’expression.
Ces arguments n’ont pas été suivis.
Pourquoi ?
Sur l’exception de courte citation
Cette exception permet à toute personne d’utiliser l’extrait d’une création, sans autorisation préalable, si l’usage de cet extrait est justifié par le caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique de l’œuvre dans laquelle il est incorporé. La source doit toujours être mentionnée.
Or en l'espèce :
D'une part, les sources n’étaient pas indiquées.
Des informations sur les titres des films et sur le nom du titulaire de la chaîne Youtube dont sont issus les extraits, figuraient sous la vidéo du clip de campagne.
Mais cela ne suffit pas car le nom des titulaires de droits n'apparaît pas.
D’autre part, les extraits de films ne sont présents qu’à titre d'illustration, en fond visuel du discours prononcé. Ils ne sont pas introduits pour illustrer un propos ou approfondir une analyse.
Sur le respect de la liberté d’expression
Selon le candidat, ces réclamations traduisaient une volonté d’interdire toute liberté d’expression dans le cadre d’un discours politique, cette liberté étant pourtant consacrée par la CEDH.
Mais les juges estiment que l'insertion d'extraits de films dans la vidéo de campagne n'apparaît pas nécessaire au discours politique. La liberté d'expression d'Eric Zemmour n'est donc pas entravée.
Cette mise en balance des intérêts entre le respect de la liberté d'expression et du droit d'auteur peut s’apprécier dans tous domaines :
Quelles condamnations ?
Eric Zemmour a été condamné pour atteinte aux droits patrimoniaux des auteurs mais également de leur droit moral.
Les juges considèrent notamment que les œuvres ont été dénaturées de leur finalité (instruire ou distraire) pour être réutilisées à des fins politiques.
Des condamnations financières et une interdiction de diffusion sous astreinte de la vidéo, ont été ordonnées.
Cette décision n’est pas définitive puisqu’un appel peut être interjeté.
Affaire à suivre.
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